Après
un convoyage dans la pétole depuis Cherbourg, Lion arrive à Cowes
le vendredi 12 mai à 17 heures, deux heures avant le départ. A peine
le temps de réparer un winch et de faire une razzia chez le " Fish
& Chips " local, et Lion prend le départ à 19 heures.
La
flotte, composée de 53 bateaux, descend le Solent vers le passage
des Needles avec le courant, par un vent de force 2 à 3. Lion se
comporte bien au louvoyage, prend assez rapidement la tête de la
classe 3 et prend le dessus sur quelques classe 2.
A la tombée de la nuit, les Needles offrent un spectacle superbe,
avec les 50 bateaux se croisant dans ce passage étroit, ce qui donne
lieu à quelques jolis duels au contact.
Après
les Needles, la flotte met le cap sur la bouée DZ(b), à 20 nautiques
dans le sud-ouest. L'option au vent de la flotte que choisit Lion
se révèle payante et Lion grignote petit à petit ses adversaires
sous le vent.
Malheureusement, le vent tombe et la flotte s'immobilise. Avec la
renverse de courant, tout espoir d'atteindre la bouée avant le jour
s'évanouit.
Lion mettra finalement une nuit complète pour virer la DZ(b), qui
n'est franchie (de justesse) qu'en milieu de matinée.
La pétole demeure bien installée sur la Manche et, alors que Lion
aborde le rail des cargos, la brume se met de la partie. La nuit
aura été très désagréable, à bouchonner dans le rail, non manœuvrant,
avec une visi de 20 mètres. Les ingénieurs du bord se livrent à
un rapide calcul : quand on voit le cargo, on dispose de 6 secondes
pour se mettre en dehors de sa route. C'est faible avec une vitesse
surface de 2 nœuds.
Il
y a trois stades dans la détection des cargos par ce temps. Premier
stade, on entend sa corne de brume. Là, pas de stress, il est loin.
Deuxième stade, on entend ses machines. Là, la tension monte d'un
cran et l'ambiance à bord s'en trouve d'un coup moins guillerette.
Troisième stade, on entend sa vague d'étrave et le barattement de
l'hélice, on ressent les vibration de la corne de brume dans la
coque (en carbone, rappelons-le). Là, ça fait vraiment peur. Heureusement,
il n'y en a qu'un seul qui nous a fait ce coup là.
La VHF du bord est mise à profit pour prévenir les épouses et petites
amies diverses que non, finalement, nous ne serons pas à Paris pour
le déjeuner dominical. Merci au CROSS Jobourg qui a bien voulu transmettre
les différents messages.
L'opération
VHF a eu un autre intérêt, c'est que le CROSS nous a demandé notre
position. Un autre voilier, qui veillait la VHF, a relevé cette
position et a constaté avec dégoût qu'il était 20 nautiques derrière,
ce qui l'a conduit à abandonner. On avait donné notre vraie position,
mais il faut bien admettre que ça donne des idées…
En fin de nuit, le vent revient et nous progressons plus rapidement
sur Aurigny. A l'approche de la ligne d'arrivée, nous croisons Lance
L'eau (classe 2) qui repart directement sur Le Havre après avoir
lui-même franchi la ligne. Echange de coups de corne de brume dans
un premier temps, puis de saluts plus civilisés par la suite, après
s'être mutuellement identifiés dans la purée de pois.
Nous ne sommes pas tout à fait au bout de nos peines, puisqu'à 0,4
nautique de la ligne, le courant commence à nous dépaler vers l'Ouest,
dans un vent de nouveau molissant. Il nous faudra une heure pour
revenir sur la ligne, en rasant la côte par une brume épaisse pour
trouver des contre-courants (un grand merci à Monsieur William Jefferson
Clinton, dit Bill, qui a eu la bonne idée d'arrêter de brouiller
les GPS la semaine précédente).
Lion franchit la ligne à 5 heures 38, le dimanche matin, après 34
heures 28 de course pour parcourir 85 nautiques. Ca n'est pas précisément
un record, mais cela permet à Lion d'être le seul classe 3 à terminer
la course, ce qui lui vaut le David Maufe Salver (très jolie assiette
en argent).
L'escale
à Aurigny, avant de repartir sur Cherbourg, fut fort sympathique
(full English breakfast au pub, seau d'araignées donné par un pécheur…),
mais c'est une autre histoire.
Résultat : 1er de la classe 3 (IRC 3), 17ème toutes classes
(IRC Overal).
Coupe : David Maufe Salver (vainqueur IRC 3)
L'équipage : Guillaume Donval, Stanislas Martin, Eric Martin,
Alexis Loison, Ivan Best, Claude Schwab, Hervé Béraud.
|